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L'impact du "porno" sur les adolescents

La pornographie atrophie l'univers fantasmatique des adolescents. La génération des trentenaires a été exposée à la déferlante de cette pornographie outrancière et nous commençons à en mesurer les effets.

La consommation de pornographie hardcore est au centre des attentions de nombreux spécialistes.


La génération des trentenaires a été exposée à la déferlante de cette pornographie outrancière et nous commençons à en mesurer les effets. Comme souvent, nous avons préféré attendre pour voir. Nous sommes maintenant au cœur d’un problème dont l’ampleur reste à définir, mais qui affectera certainement la vie érotique de nombreux jeunes hommes. Une étude anglaise que nous avons citée dans un précédent article a conclu que 30% des moins de trente ans souffraient de troubles de l’érection, générés par une anxiété de la performance. Concrètement, ces jeunes adultes, ont développé une appréhension de la qualité de leur érection. Mais on ne saurait simplement invoquer la notion d’anxiété pour comprendre la recrudescence des troubles érectiles. L’érection est aussi dépendante de la puissance du désir et on ne peut sous-estimer l’impact négatif de la pornographie sur ce dernier.


Le porno qui est censé être un érotisme destiné à satisfaire les hommes est en réalité leur pire ennemi. La fantasmatique qui se construit à partir des premières masturbations est, pour les générations du net, formatée par des images et des pratiques standardisées faisant fi de la diversité des univers émotionnels. L’étayage du désir sexuel, qui prend ses racines dans la plus tendre enfance, se finalise au temps de l’adolescence. Jusqu’à l’avènement d’internet, les garçons n'avaient d'autres ressources que leur propre imagination pour élaborer des scenarii sexuellement excitants. De fait, ils se construisaient dans la succession des masturbations un univers érotique qui leur était propre, en adéquation avec leur sphère émotionnelle. Ainsi posaient-ils les fondations à partir desquelles allaient se développer les ressorts de leur vie sexuelle à venir. Pour les adolescents d’aujourd’hui, l’excitation nécessaire à la masturbation se trouve satisfaite par des images exogènes qui, au fil des années, deviennent leur unique référentiel orgasmique. En d’autres termes, une fois privés d’accès aux contenus pornographiques, ils se masturbent en convoquant des tableaux et scenarii issus de leur mémoire et non de leur imaginaire.


Mais cette fantasmatique importée ne paraît pas être en mesure d’offrir dans le temps les mêmes développements dynamiques que celle construite sur des fondements propres à chaque l’individu. Métaphoriquement parlant, nous pourrions dire qu’il est préférable d’apprendre à cultiver son champ plutôt que de s’en remettre à autrui pour se nourrir. On se demande alors si les troubles de l’érection que connaissent certains jeunes adultes ne seraient pas la conséquence d’un affaissement du désir résultant d’une atrophie des fantasmes personnels.


Il a été maintes fois démontré que le pouvoir d’excitation sexuelle d’un contenu porno est éphémère, qu’il s'appauvrit à chaque visionnage. Pris dans le cercle vicieux de la consommation pornographique, l’individu se condamne à un renouvellement constant de ses sources de motivation. Peu à peu, des scénarios qu’il ne pourra reproduire dans la vie réelle s'imprimeront dans sa sphère émotionnelle. À ce stade, confronté à une relation érotique authentique, ses référentiels pornos ne trouveront aucun écho, en clair il bandera mou ou pas du tout. Car son cerveau, comme celui d’un drogué, ne répond plus qu’à des sollicitations extrêmes, des scènes qu’il ne peut rejouer dans le contexte d’une relation véritable, sauf à trouver une partenaire ayant des attentes particulières. Et gageons qu’il éprouvera quelques difficultés à dénicher « l’heureuse élue » qui prendra son pied en accueillant deux ou trois pénis dans l’anus et autant dans le vagin, le tout en étant copieusement insultée, frappée, humiliée et jetée après utilisation comme un vulgaire Kleenex morveux.


Parce que le porno est un agglomérat d’absurdités, autant du point de vue anatomique, que de celui des performances physiques, du plaisir féminin ou de la notion de consentement, il ne peut servir de modèle érotique efficient. Pire, il inculque des contre-vérités dont l’aficionado subira les conséquences : incompréhension des femmes, perte de désir, anxiété de la performance, troubles érectiles, dont il aura grand mal à se défaire seul. Les générations biberonnées à internet paient aujourd’hui le prix de notre incapacité endémique à anticiper les problèmes. Il en est ainsi de la pornographie comme il en est de l’agriculture intensive, de la vaccination à tous crins ou encore de l’utilisation immodérée du plastique.


Encore une fois, nous allons devoir panser les plaies à défaut d’avoir su prévenir les blessures. Pour se refaire une santé érotique et renouer avec les joies de la sexualité, ces jeunes hommes en proie à des difficultés sexuelles multiples devront prendre conscience qu’ils ont organisé leur fantasmatique sur des fondations déliquescentes et surtout, accepter de se déconstruire pour se reconstruire. Ici les sexologues auront fort à faire pour inventer les outils nécessaires à la restauration des univers fantasmatiques personnels, combattre les ravages occasionnés par une éducation érotique que nous aurons abandonnée aux pornographes.

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